Avec l'accélération des réouvertures - frontières, bars-cafés-restaurants, établissements secondaires, salles de sport - annoncée par le Président de la République le 14 juin, la France entière passe enfin au vert tandis que le confinement semble désormais derrière nous. Cette période restera-t-elle un mauvais souvenir ?
- Oui si nous n'en tirons aucune leçon, ce qui a été presque toujours été dans le passé le réflexe intuitif des populations après avoir traversé de grandes épidémies. L'oubli comme refuge...
- Non, si nous savons comprendre nos failles et faire en sorte de les colmater pour l'avenir, afin d'être plus réactifs.
L'Europe par exemple a su tirer les leçons de la crise financière de 2009 pour proposer rapidement une réponse appropriée aux Etats-membres tout en leur permettant d'avoir recours massivement à la dette pour concocter leurs plans d'urgence et de relance.
En ce qui nous concerne, le Président de la République vient d'ailleurs de le rappeler dans sa dernière Adresse aux Français en affirmant que « l'épreuve de la pandémie avait révélé des failles, des fragilités comme notre dépendance à d'autres continents pour nous procurer certains produits, nos lourdeurs d'organisation, nos inégalités sociales et territoriales ».
Qu'ont révélé la crise sanitaire et le confinement ? Une embolisation de notre système de soins, une absence d'anticipation, une dépendance vis-à-vis de la Chine et de l'Asie sur les masques, les blouses, les respirateurs, une fracture numérique que l'on faisait mine d'ignorer...
Mais nous avons su collectivement faire face, d'abord en expérimentant à grande échelle, comme avec la mise en place des hôpitaux de campagne. Nous avons tous fait fonctionner le système D. Des entreprises PME-ETI ont réorienté leur production pour produire du gel hydroalcoolique ou fabriquer des masques. Elles ont adapté leurs flux logistiques, productifs et organisations internes en un temps record. Les salariés, aussi, ont consenti à mettre entre parenthèses leurs droits acquis pour délivrer ou adapté leurs organisations personnelles pour être sur le pont. Ce fut l'agilité.
D'autres ont fait en sorte de préserver leurs sous-traitants, fournisseurs, l'ensemble de leur chaine de valeur. Contrairement aux idées reçues, les régions, les départements, les communes ont su parfaitement s'adapter pour répondre aux contraintes de l'état d'urgence sanitaire, parfois mieux que l'Etat lui-même. La France des territoires a globalement mieux vécu le confinement au point d'inverser la traditionnelle opposition Paris-Province. 65% des personnes vivant en zone rurale ont estimé que leur logement était tout à fait adapté pour vivre confiné, 35% seulement en Île-de-France. La généralisation du télétravail, et la recherche d'une meilleure qualité de vie, pourraient même bouleverser à terme les projections des agents vis-à-vis du marché immobilier particulier ou d'entreprise... Face à la pesanteur du confinement, chacun a pu comprendre tout l'intérêt que représente son voisinage, un circuit court, le bassin d'emploi. Ce fut la proximité.
Pour prévenir la déroute économique et le chaos social, l'Etat a su mettre en place un régime augmenté de chômage partiel pour préserver la demande et empêcher le drame des licenciements. Nous aurons appris la valeur du lien, le pouvoir de la solidarité et l'anticipation. Ce fut la sécurité.
Comme le modèle de Solow qui explique la croissance par une combinaison optimisée des facteurs de production, celui de l'après-crise reposera également sur une combinaison. Le télétravail, plébiscité par 73% des salariés, illustre parfaitement cette combinaison plus optimale tout comme elle exprime cette recherche collective d'agilité.
Nos points d'améliorations désormais révélées au grand jour nous montrent qu'il faudra savoir conserver l'agilité acquise pendant la crise. L'après-crise ne devra pas sacrifier la sécurité, ni tout lui sacrifier non plus. Notre horizon, jusqu'alors si éloigné, s'est rapproché. La proximité devient une nouvelle balise. Au niveau macro économique comme à celui de l'entreprise, agilité, proximité et sécurité fourniront la combinaison gagnante de l'après-crise.